29 octobre 1981 : Mort de Georges Brassens
Bien plus que comme un simple chanteur, ou comme artiste de variétés talentueux, Brassens peut – et doit – être considéré, si l’on se réfère à l’ensemble de son œuvre – pour reprendre la formule consacrée… – comme un brillant promoteur et illustrateur de la Langue française.
A l’instar des grands chanteurs du Canada (les Vigneault, les Leclerc…), il n’a cessé, par la qualité de ses textes et le soin qu’il apportait au maniement de la langue, d’être, justement, un grand serviteur de la langue et de l’esprit français, qu’il a diffusés et fait aimer d’abord en France mais aussi dans le monde entier, comme en témoignent les traductions de ses chansons dans des langues aussi diverses que l’hébreu ou le japonais; et le succès constant qu’elles continuent de remporter dans de nombreux, et lointains, pays…
L’extension et la vitalité du français dans le monde, dans la Francophonie mais avant tout en France qui a aujourd’hui bien besoin de renouer avec sa langue et sa culture originelles menacées, cela passe aussi par les chansons lorsque, comme c’est le cas de celles de Brassens, elles offrent des textes de grande qualité et des mélodies sur lesquelles le temps n’a pas de prise. Et qui, même s’il s’agit d’un art considéré comme mineur, peuvent aussi exprimer toute une poésie et transmettre leur part de sagesse ou de philosophie.
Brassens a, par ailleurs, mis en musique plusieurs poèmes célèbres, contribuant ainsi à les populariser encore plus : par exemple – mais il en a chanté bien d’autres… – la Ballade des Dames du temps jadis (de François Villon). ■
Publié le 29 octobre 2021 – Actualisé le 21 octobre 2023
Voir aussi l’éphéméride du jour.
Brassens a illuminé ma jeunesse, c’est le premier disque que j’ai acheté à quatorze ans (avec un Louis Amstrong) dès que j’ai eu mon Teppaz. Je l’ai vu sur scène deux fois et l’affection circulait entre son public et lui; même dans ses « gros mots » il faisait preuve de pudeur et a appris ou rappelé à beaucoup certains jolis mots de notre belle langue. Il était étranger à toute récupération et les cuistres d’aujourd’hui en sont pour leurs frais.
Et » les passantes » d’Antoune Pol, auteur inconnu ( 18988-1971) que Brassens découvrit en pleine occupation chez un bouquiniste et mort à la veille de le rencontrer.
Et « La prière » de Francis Jammes ( 1868-1938)
Et « Gastibelza » de Vistor Hugo ( la guitare)
Et « le petit cheval » inspiré par Max Jacob.
Un autre chanteur compositeur bien méconnu à présent qui a illuminé les années 1950: Jacques Douai ( 1920-2004) avec « démons et merveilles » ( Jacques Prévert), File la laine ( jacques Marcy), Madame la Dauphine ( Max Jacob), O belle à la fontaine ( Lanza del Vasto), l’étang chimérique ( Leo Ferré) , maintenant que la jeunesse , il n’aurait fallu , ( Aragon), Colchique dans les pré ( Jacqueline Debatte)
Ravi que le commentateur précédent ait cité » Les passantes », qui est une merveille.
On pourrait ajouter, toujours de Victor Hugo « La légende de la nonne ».
Mais de la plume de Brassens lui-même, que de merveilles avec « Le 22 septembre « , la « Supplique pour être enterré sur la plage de Sète » ou avec « Saturne », vrai chef-d’oeuvre…
Oui , admirable poéme ( les passantes) d’un ingénieur inconnu parfaitement mis en musique par Brassens qui toutefois supprima une strophe, poéme quasi unique qui suffit à mettre au pinacle Antoine Pol, un peu comme Felix Arvers et son fameux sonnet ( sur le même théme).
« Mon âme a son secret, ma vie a son mystère :
Un amour éternel en un moment conçu.
Le mal est sans espoir, aussi j’ai dû le taire,
Et celle qui l’a fait n’en a jamais rien su.
Hélas ! j’aurai passé près d’elle inaperçu,
Toujours à ses côtés, et pourtant solitaire,
Et j’aurai jusqu’au bout fait mon temps sur la terre,
N’osant rien demander et n’ayant rien reçu.
Pour elle, quoique Dieu l’ait faite douce et tendre,
Elle ira son chemin, distraite, et sans entendre
Ce murmure d’amour élevé sur ses pas ;
À l’austère devoir pieusement fidèle,
Elle dira, lisant ces vers tout remplis d’elle :
« Quelle est donc cette femme ? » et ne comprendra pas. »
A rapprocher aussi de Charles d’Orléans ( 1394-1465) dont chacun se récite: « Le temps a laissé son manteau – De vent de foidure et de pluye -Et s’est vétu de broderie- De soleil luyant, cler et beau … » et qui participa au concours de Blois avec François Villon et Jean III Robertet sur le théme « je meurs de soif auprès de la fontaine ». Charles resta 25 ans enfermé dans la sinistre tour de Londres après Azincourt et libéré à 50 ans se maria avec une jeunette de 15 ans !..
Voir une émission de 1h50 sur France 5
Disponible jusqu’au 03/11/2023
https://www.france.tv/documentaires/art-culture/1375871-brassens-par-brassens.html
La langue française est à la fois notre identité et notre patrimoine, ce qui attire et continuera à attirer tous les peuples; Brassens en est le digne serviteur