Elle est peut-être le plus bel exemple de l’irréalisme technocratique et de l’éloignement des réalités: on voit bien que, dans les faits, la Carte Scolaire limite, en la restreignant, l’égalité des chances qu’elle prétend instaurer, et qu’elle perpétue, en les amplifiant, les inégalités qu’elle prétend combattre. Pourtant on la subit depuis des années, et elle n’est toujours pas purement et simplement supprimée. Or, selon nous, cette suppression s’impose, et cela pour au moins deux raisons: la première est une raison de fond; la république devrait cesser de raisonner et d’agir presque exclusivement en termes d’obligation et d’interdiction; on écrit « Liberté » au fronton des monuments – et des écoles – mais dans les faits on ne cesse de légiférer sur tout (surtout légiférer? voyez Chirac, champion incontesté toutes catégories, avec ses incessants recours à la Loi et ses incessantes modifications à la Constitution, finalement grotesques vu leur nombre….
Au train où vont les choses, et si on n’y met pas le holà, la république nous aura bientôt concocté une société où, de toutes façons, l’esprit critique, les moeurs, la vertu, plus rien n’aura d’importance puisque tout ce qui ne sera pas interdit sera obligatoire, et réciproquement! Le choix n’aura même plus à s’exercer, entre les 50% de choses obligatoires et les 50% de choses interdites! C’est encore de la science fiction et de la polémique, un rien excessive, convenons en: il n’en demeure pas moins que la tendance est là, et qu’elle ne cesse de se renforcer; le danger existe bel et bien; mieux vaut donc le signaler « avant »…
Pour en revenir à l’école, voici la deuxième raison pour laquelle il faut selon nous supprimer la Carte Scolaire (en fait elle découle logiquement de la première…): imaginons une famille s’apprêtant à scolariser un ou plusieurs enfants; si le collège ou le lycée « de secteur », actuellement obligatoire -sauf dérogation-, ne convient pas à cette famille, et ce quelle qu’en soit la raison, on ne lui demandera pas son avis et elle sera contrainte d’y scolariser sa progéniture; les plus malins peuvent jouer bien sûr du « piston », toujours bien vivant, ou des « astuces » qui permettent de « tricher légalement », la plus connue étant le choix des options: il suffit que votre enfant demande à étudier le Chinois ou le Farsi pour qu’il échappe à son établissement de secteur…; tout cela est très hypocrite et, finalement, très néfaste pour le système éducatif: en effet, tout a toujours besoin d’être évalué sans cesse, pour pouvoir justement être amélioré; or les premiers et les meilleurs évaluateurs du système scolaire, ce sont les parents car, dès qu’il s’agit de leurs enfants -et c’est d’ailleurs tout à fait normal, c’est bien compréhensible et c’est très heureux…- l’idéologie n’a plus sa place et on ne peut pas leur raconter de sornettes: ils ne croient que ce qu’ils voient! en réalité, si l’on veut une saine émulation entre les établissements, et si l’on veut que le système repose sur de bonnes bases, il faut justement laisser aux parents le choix de l’établissement: c’est la seule manière efficace et infaillible de faire apparaître les problèmes éventuels, ce qui permettra ensuite de les résoudre.
Aujourd’hui on fait l’inverse: on assure à tout établissement un public « captif », et ce quoi que fasse ou ne fasse pas cet établissement, quels que soient ses lacunes et ses défauts, même s’il fonctionne mal, même s’il ne remplit pas sa fonction: c’est la prime à l’irresponsabilité et au laisser-aller! Alors que si les parents étaient libres de leur choix, on verrait très vite quels sont les établissements désertés, on pourrait aisément en déceler les causes, et donc y porter remède: qu’il s’agisse de délinquance, de moyens matériels insuffisants, de manque de formation des personnels, d’inadaptation des locaux ou de tout autre motif….; nos idéologues du Ministère de l’Education, déconnectés du réel, en ont décidé autrement et imposent depuis bien longtemps -trop longtemps!- leurs théories fumeuses et leurs logiques abstraites; forcément, ils ont le le mode d’emploi, et peuvent donc aisément passer à travers! : il suffit de voir dans quels types d’établissements vont les enfants de la classe politique et des personnels de l’Education…
Marc Vergier sur Histoire ▬ Le 23 novembre 1944…
“Question : Est-ce lui que Charles de Gaulle, à qui il venait proposer sa collaboration, a…”