3 L’ouverture de l’école
Si l’on veut comprendre la spécificité de l’institution scolaire, dans son rapport aux impératifs de la connaissance et à la vocation de l’homme à réaliser son humanité, on doit abandonner ce que les théoriciens des sciences de l’éducation appellent le « triangle didactique ». Ses trois angles seraient, dans le langage convenu de la pédagogie nouvelle, le « savoir », « l’apprenant », et le « formateur », ou, mieux encore, selon la logomachie prétentieuse des pédagogues actuels, « l’épistémologie de référence de la discipline considérée », « la psychologie cognitive » et « les contraintes de la situation de formation » (18). On voit mal d’ailleurs comment l’élève pourrait occuper le centre du système éducatif dès lors qu’on confine l’apprenant à l’un des angles de ce triangle pédagogique.
Si l’on veut opérer cette révolution copernicienne de l’éducation qui consiste à revenir à la réalité elle-même, il faut comprendre l’originalité de l’école en tant qu’institution spécifique afin de saisir ce qu’il y a en elle de permanent et de légitime pour offrir aux hommes une ouverture vers la culture véritable.
Si l’étymologie du grec skholé est obscure, on sait que le premier sens de ce terme est l’« arrêt » dans le cours du temps, d’où les sens de « repos » et de « loisir », comme on le voit chez Pindare dans les Néméennes (10, 85). Les expressions skholen echein ou skholen labein signifient couramment « faire une pause » ou « se donner du loisir ». Platon prendra ce terme dans le sens plus large de l’occupation propre à un homme de loisir, celui qui suspend un temps les processus vitaux et sociaux pour se consacrer à la discussion et à l’étude. À la différence des hommes qui traînent dans les tribunaux et les lieux publics, toujours à l’affût d’une méchante plaidoirie, les philosophes « ont toujours présent ce bien, le loisir (skholé), et les propos qu’ils tiennent, ils les tiennent dans la paix et à loisir (en eiréné epi skholês) » (19). Aussi doit-on distinguer deux types d’hommes, celui qui vaque aux affaires courantes, contraint par la nécessité, et celui « dont l’éducation s’est faite dans une liberté et un loisir réels (en eleuthería te kaì skholé) » (20), le philosophe ami du savoir, c’est-à-dire l’homme cultivé.
Henri sur L’intéressante « trouvaille » de Michel MICHEL
“L’anti-germanisme pour son monde et sa culture est une erreur et un aveu de faiblesse, que…”